Extrait de collecte : Nos croyances

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Eras Nostas Credenças

Le contexte : Jean-Baptiste travaillait dans une banque, il a toujours vécu à Saint-Girons mais sa famille était originaire de la Bellongue (era Vath-Longa). Il en a l’accent même s’il n’y a jamais véritablement vécu. C’est la deuxième fois que nous venons voir ce monsieur qui en impose par ses allures de sage. Nous le connaissions déjà par ses interventions sur Radio Couserans dans «la Voix de la Montagne» et c’est pour ceci que nous voulions le rencontrer. Nous avons été accueilli en amis dans cette petite maison remplie de photos de famille et de souvenirs. Comme nous pouvions nous y attendre, cet entretien n’a pas été comme les autres : plus poussé, plus érudit, plus réfléchi. Jean-Baptiste répond avec calme et application à nos questions, le labrador qui dort sur le fauteuil derrière, fait quelques apparitions dans le champs.

 

L’extrait : Est-il bien nécéssaire d’expliciter la pensée de Jean-Baptiste tant elle est claire et précise ? Il construit une étonnante comparaison entre les superstitions d’autrefois (tremper la statue d’un saint dans une fontaine pour faire pleuvoir) et ce qu’il appelle «eras nostas credenças» (nos croyances) : notre foi dans le progrès, notre confiance envers un système économique destructeur, notre consternante naïveté quand nous croyons que la technologie nous rendra heureux. La profondeur et la fraicheur de cette pensée est telle qu’elle nous accompagne encore aujourd’hui.

Sur la forme, il est aussi intéressant de constater avec quelle «lenteur» son discours se construit, il choisit ses mots, il manie le silence jusqu’à nous asséner sa conclusion les yeux dans les yeux. L’art même du discours ! Lors du projet Tramontana, j’ai fait visionner cet extrait en Toscane à un public cosmopolite venu d’Afrique noire, du Mahgreb, et de partout en Europe. Quand il fut achevé, les gens applaudirent à l’unisson. Malgré leurs différences culturelles, tous s’y étaient retrouvés.

L’on peut imaginer comment dans un média traditionnel comme la radio ou la télévision, il aurait déjà été coupé et recoupé car il faut aller vite, même si c’est pour parler dans le vent.

 

Renaud Lassalle